Lecteur, souviens-toi de Voisin Antipathique, cet abruti qui fume clope sur clope en présence de son poupon, et qui m’engueule comme du poisson pourri parce que ma voiture a déjà senti l’essence.

Lecteur, laisse-moi maintenant te raconter mon moment de vengeance personnelle, savouré à plein.

Connaissant l’hiver que nous subissons, il est tombé quelques jolis centimètres de neige ces derniers temps. Cette odieuse neige se loge partout, et n’ignore pas l’allée menant à la porte d’entrée de mon immeuble. Or, depuis environ une semaine, ladite allée s’avérait impratiquable, pour cause de non-déneigement.

Ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas de quelques bêtes centimètres de neige folle gentillement poudreuse accumulée là au gré du vent et qui fondra demain, parce qu’après la neige, le beau temps. Ces centimètres de neige, ils étaient coriaces, bien tapés, bien durs, bien glacés. D’abord à cause du froid, ensuite à cause du passage répété de tous les locataires de l’immeuble… logique.

Or, par un hasard innomable mais ô combien savoureux, l’indispensable personnage responsable du déneigement des allées par chez moi, c’est (vous l’aurez deviné) mon cher Néanderthal Man. Vous devinez également que Néanderthal s’est accordé quelques jours de congé tout récemment.

Hier soir, un peu exaspérée par l’état presque impratiquable de l’allée, je suis allée me plaindre au propriétaire:

– Dites-moi, c’est normal que l’allée devant chez moi soit exempte de toute trace de pelletage depuis au moins une semaine ?
– Euh… non, il y a quelqu’un qui doit s’en occuper, normalement. Vous habitez où ?
– Au coin de ma rue.
– Ah, oui, je vois, c’est Monsieur TrucMachin qui s’occupe de ce secteur.
– D’accord… et Monsieur TrucMachin, il est syndiqué ?
– … ?? Non, pourquoi ?!
– Ah, il ne fait pas la grève ?
– … Non, c’est un locataire comme vous, il a une réduction sur son loyer pour s’occuper de l’allée.
– Ah. Bah vous pourrez lui retirer sa réduction pour le prochain mois, il ne fait pas son travail.
– Bah pourtant si, regardez, à côté du coin de votre rue…
– Ah non, excusez-moi, je parlais égoïstement de mon coin de rue… pas d’à côté.
– Bon, je verrai à ça, j’en parlerai à Monsieur TrucMachin.
– Merci, c’est bien aimable… C’est surtout que si je me casse la gueule dans cette allée, malheureusement pour vous, vous le saurez très rapidement, je n’ai pas les moyens de payer une réparation d’appareil photo, surtout si je ne suis pas responsable du bris.
– … Je comprends.

Et voilà-t’y pas que cet après-midi, j’ai observé Cro Magnon s’éreinter, clope au bec, à piocher dans la neige durcie, et à pelleter tous ces jolis blocs de glace. Je l’ai regardé avec un plaisir non dissimulé, moi-même étant dissimulée derrière la fenêtre de mon salon.

J’ai résisté (héroïquement) à l’envie de sortir faire mes courses (ça peut attendre à demain) pour faire exprès de passer à côté de lui. J’ai résisté parce que je sais que je n’aurais pas pu m’empêcher de glisser un commentaire du genre “c’est pas trop tôt” ou “beau temps pour étendre, non ?”… Bon j’ai aussi résisté parce que je n’ai pas envie de retrouver un bloc de glace sur le capot/toit/pare-brise de ma voiture.

N’empêche, regarder ce gros plein de soupe/nicotine/cholestérol/m…. se briser le dos et s’user les muscles sur une pelle à jardin (si si !! pour casser la glace !) pour dégager une allée -tâche dont je me serais acquittée en 20 minutes, pas en 1h15- ça fait trop plaisir.

Merci Cro Magnon, tu m’as bien fait rigoler aujourd’hui. Et tu sais le plus beau dans tout ça ? Dès le mois d’avril tu ne verras plus ma voiture, et moi je ne verrai plus jamais ta sale gueule de gros lard ! Elle est pas belle, la vie ?