Après avoir effacé une bonne dizaine de fois l’hypothétique première phrase de ce texte, j’en viens à la conclusion que les mots me manquent pour décrire tout ce que j’ai en tête.
Une fois de plus, la France m’arrache quelque chose. Pour trois mois, certes, mais la blessure est profonde.
En faisant le compte, j’ai réalisé que dans mes amis, sur ma liste MSN, dans mon carnet d’adresses, et dans ma vie, il y a plus de “France” que de “Québec”. Cette nuit, vers 1h du mat, la France pourra compter 4 Québécois très près de moi: Lysis, en Bretagne depuis septembre; Lysanne, au pays basque depuis la fin décembre pour fignoler son style culinaire; David, mon ancien directeur photo au journal, à Lille depuis peu et jusqu’en juin; et enfin Beni, que j’ai regardé partir, le coeur serré, à 18h25 ce soir, direction CDG, puis Nice. Si on ajoute mon oncle (frère de mon père) établi en Auvergne depuis presque 20 ans, il ne manque pas grand chose au portrait… moi, peut-être ?
Autour de moi, dans mon entourage immédiat, je fréquente plus de Français que de Québécois -si on ajoute les collègues de classe, le ratio augmente encore.
Sur ma liste MSN, j’ai 21 Français pour 18 Québécois, et quelques minorités visibles ontariennes, américaines, suisses et allemandes.
Mes correspondants électroniques réguliers sont à 85% français, 10% américains, 5% québécois.
Omniprésente, cette France. La décoration de ma chambre en témoigne: photos de la Tour Eiffel, d’une rue de Clermont-Ferrand, d’une chapelle à Léotoing (43), du colombarium du Père Lachaise, d’une gargouille de Notre-Dame-de-Paris, du Mont Blanc, des cartes postales… J’ai toujours mon porte-clés du Tour de France 2003, mon ordinateur portable est en AZERTY (je conserve mon doigté bilingue), j’écoute Bénabar, Thomas Fersen, je dis “chaussettes” et “le truc qui tue”…
Chaque fois qu’une personne près de moi quitte pour la France, peu importe pour combien de temps, je ne peux m’empêcher de lui donner quelques conseils quant à la vie dans l’Hexagone: je ne suis certes pas Française, mais j’y ai vécu presque un an complet, et je suis observatrice. L’expérience et les connaissances acquises au cours de mon voyage me sont d’une très grande utilité, presque tous les jours. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai fait rire de moi en prenant l’accent français inconsciemment, ni combien de fois on m’a demandé “Nan sans déconner, t’es au Québec depuis combien de temps ? Parce que tu connais vachement bien le coin !”…
Voir les gens autour de moi s’exiler dans le pays qui m’a accueilli pendant si longtemps, c’est très difficile. Je donnerais bien des choses pour prendre leur place -et je sais que certains me la donneraient. Le départ de Beni marque le début d’un décompte au bout duquel je referai une traversée de l’Atlantique en direction du pays de la bonne bouffe. (Et ne me faites pas croire qu’on mange bien “au naturel” ici, sinon je vous fais ingurgiter une pelletée de neige assaisonnée au calcium.) Je sais d’ores et déjà que me retrouver en France, 3 ans après y avoir vécu, ce sera très… particulier.
J’ai une liste de gens à voir/revoir, des lieux à visiter/revisiter, mais la priorité sera la Côte d’Azur. Cette fois-ci, je suis bien déterminée à ne pas laisser la distance foutre en l’air ma relation amoureuse, c’est la plus sérieuse que j’ai eue depuis justement 3 ans, et je compte bien garder Beni aussi longtemps que notre santé mentale le permettra.
D’ailleurs, petit message aux FRANCAISES qui habitent Nice et les environs (genre Antibes, et Sofia Antipolis): BAS LES PATTES, C’EST MON QUEBECOIS ! Je ne vous empêche pas de le zyeuter, il constitue un très joli paysage… mais observez que j’ai marqué mon territoire, et ne vous avisez même pas de lui demander s’il a une copine. Parce que c’est moi, sa copine. Compris ? Merci.
Pour l’instant, je sirote mon thé en espérant pouvoir partir le plus tôt possible à la fin de ma session… j’espère pouvoir bientôt compter les jours, en attendant d’aller rejoindre cette partie de moi qui foulera bientôt le territoire français -évitez de me le traumatiser, on espère passer notre vie ailleurs qu’au Québec, et la France n’est pas encore exclue…
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