Dans un mail de mon père, aujourd’hui:
“Sans trop savoir pourquoi, j’ai le coeur gros et je suis tout triste.”
Moi j’ai une petite idée: il vient de quitter mon chez-moi, il est venu passer quelques jours, et là, il rentre dans son chez-lui qui ne lui plaît pas plus qu’il faut.
Mais cette petite phrase m’a fait quelque chose à moi: c’est la première fois (à ma connaissance) que mon père signale ses sentiments de la sorte. Je connais son ras-le-bol généralisé pour bien des choses, sa hargne, sa frustration, mais tout ça, il le répète en boucle depuis des années…
Je crois que c’est parce qu’il réalise qu’au moment où on se rapproche, c’est lui qui planifie un départ: il veut aller enseigner sur un autre continent.
Depuis que je suis rentrée, on discute bien, et à chaque parole que je prononce, il est de plus en plus fier de sa fille… This whole “dad-is-proud-of-me”-thing is still a little new to me.
Parfois, ça me gêne un peu: je ne sais pas trop comment accepter ces compliments qui me semblent démesurément “trop”.
Pas que je ne croie pas les mériter, seulement j’ai l’impression qu’il s’enthousiasme “à coeur perdu” (corps ? âme ?) pour sa fille parce qu’elle dit des choses belles et sensées, qu’elle est cultivée et curieuse, qu’elle aime la bonne musique, etc.
Ce sont de bonnes raisons d’être fier, mais je trouve un peu particulier cette fierté alors qu’il a mis tant d’années à me parler…
Peut-être que je me pose trop de questions ? Que je ne réalise pas certaines choses qui devraient me sauter aux yeux ?
François B. doit avoir raison: I’m just blind because I put my hands in my face, so I can’t see anything, then I don’t realize how lucky I am.
Une pensée à propos du bien et du mal me tourne dans l’esprit depuis un moment, je vais essayer de l’exposer, sans transition.
Comment le mal peut-il motiver un geste ?
Je fais partie de ces (sombres ?) utopistes qui croient que l’Homme est fondamentalement bon. Pour moi, un geste ne peut pas être motivé par le mal pur.
Il ne peut être motivé que par le “bien”. (Sans grande envie de le définir ici, je crois avoir une vision trop naïve pour gaspiller plus de temps.)
Certes, ce geste peut avoir de mauvaises conséquences, surtout s’il part d’une mauvaise “déviation” du bien. L’amour, par exemple, engendre facilement la colère, la haine, la jalousie… que l’on considère comme mal, alors que l’amour est bien.
Dans le cas d’une mauvaise conséquence involontaire, on peut s’en tirer en disant “sorry, I didn’t mean it”, mais dans le cas opposé, pourquoi s’excuser pour quelque chose de volontaire ?
Le geste purement gratuit existe-t-il ? Celui qui n’est motivé par rien du tout, et qui ne rapporte rien ?
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