On a expérimenté les changements de plan dûs à la météo! Alors qu’on devait être à quai à Haïfa le 1er décembre, puis le 2 à Ashdod, une tempête sur la Méditerranée a poussé le capitaine du Vision à changer son itinéraire: nous voilà donc à quai à Haïfa pour environ 36 heures, puisque nous n’irons pas à Ashdod et que le bateau quittera le port en début d’après-midi pour contourner et « devancer » ladite tempête, en direction de Port Saïd, l’entrée du Canal de Suez.

Les priorités ont donc changé: alors qu’on avait prévu visiter Jérusalem le lendemain, c’est notre seule chance d’y aller aujourd’hui, préférant garder l’avant-midi du lendemain pour aller marcher dans Haïfa et voir les jardins Baha’i.

J’ai dû faire sortir Christophe de sa zone de confort pour aller à Jérusalem. Alors que je suis très à l’aise avec l’improvisation et les risques modérés, il n’était pas du tout tenté de prendre le train pour se déplacer. C’était cependant notre seule option. Encore une fois, le forfait de données sur le téléphone s’est révélé crucial pour télécharger l’application des trains israéliens et se dépatouiller dans les horaires et les changements!

Après avoir été confrontés à une première dame fort peu sympathique et aidante à la gare, nous avons retiré des Shekels d’un guichet puis acheté nos billets aller-retour, avec un rabais en plus, courtoisie de l’information de la deuxième dame très gentille qui nous a recommandé d’aller nous faire faire des cartes offrant 20% de réduction, pour les citoyens étrangers seulement. C’est donc à peine 60 Shekels (environ 20$ CAN) que nous aura coûté le trajet complet en train très confortable et ponctuel (à l’aller du moins).

Une chose surprend la vue du canayen moyen, qui n’a pas l’habitude de voir des gens en armes et uniformes partout dans les rues… le service militaire étant obligatoire là-bas, beaucoup de jeunes d’environ 18 ans sont ça et là en déplacement, en tenue de service. Tous sont très aimables et offrent spontanément leur aide dans un anglais rudimentaire lorsqu’ils nous voient s’affairer à déchiffrer un plan de train. Heureusement pour nos yeux habitués à l’alphabet latin, tout l’affichage dans le pays est trilingue: arabe, hébreu et anglais.

Nous changeons de train à Tel-Aviv, pour quitter la ligne qui longeait la côte. On se dirige maintenant en plein coeur des montagnes. Le trajet total durera environ 1h30. La voie est sinueuse et le train grimpe! Les paysages sont parfois lunaires, parfois agricoles, avec des plantations de clémentines. Des habitations de fortune ça et là, des ânes, des chèvres… on voit que la richesse du peuple n’est pas dans les terres arides mais bien dans les métropoles modernes.

Nous voilà à Jérusalem: le train nous amène à quelques centaines de mètres d’un énorme centre commercial, mais encore bien loin de la vieille ville. Nous devrons prendre un taxi, constat fait après s’être orientés encore une fois grâce à Google Maps. À noter que tout juste de l’autre côté de la clôture « frost » à la gare, c’est… la Cis-Jordanie. Je suis convaincue que lors de notre passage, nous avons marché à des endroits qui ont été par la suite la cible d’attentats. Les portes de la vieille ville sont d’ailleurs criblées d’impacts à plusieurs endroits. La « poudrière » est visible, mais imperceptible: à aucun moment nous n’avons craint pour notre sécurité au cours de notre bref séjour en terre israélienne. La population est rompue aux exercices et mouvements d’urgence, et contrairement à nous, ils répètent ces exercices une fois par mois. On est loin de l’évacuation annuelle en cas d’incendie…

Marcher dans la vieille ville de Jérusalem a quelque chose d’un peu intimidant: on a toujours peur de mettre les pieds dans la cour arrière privée de quelqu’un! Les symboles religieux se côtoient dans une bizarre harmonie hétéroclite: il y en a pour tous! Le mur des lamentations, vide lors de notre passage, est mieux observé du haut des fortifications. Un conseil: faire le tour des murs, en alternant enter intérieur et extérieur, constitue le meilleur moyen de voir autant les incontournables que d’avoir quelques surprises au détour d’un passage piéton. La vieille ville est « cartographiée » au mètre près, difficile de s’y perdre lorsqu’on a des outils pour se repérer. Par contre, facile de faire du sur-place si on ne se fie qu’à notre mémoire! Malgré l’affichage omniprésent, nous avons fait demi-tour -oh, on est déjà passés par ici, non?- à quelques reprises. L’allée principale est étroite, et chaque côté est flanqué d’innombrables boutiques de souvenirs. Encens, vaisselle, symboles variés, gadgets à touristes, art légitime, il y a de tout. C’est étrangement « beau » à voir, de loin, mais chaque fois qu’on a pris quelques minutes pour s’attarder au réel contenu des étalages, rien qui ne nous interpelait. Si j’avais eu des moyens plus amples, j’aurais peut-être cédé pour un petit tableau ou une petite sculpture d’un artiste local… mais en art moderne.

Il a plus toute la durée de notre visite dans la vieille ville. J’en avais les orteils détrempés, la peau plissée! En sortant des fortifications, nous nous sommes retrouvés dans une allée commerciale piétonne, où tous les magasins modernes se voisinent, à l’américaine. J’y ai trouvé une boutique de sacs, parapluies et autres accessoires mode, j’ai craqué pour un superbe parapluie qui me semble à toute épreuve. Je préfère un souvenir utile comme celui-ci qu’un bibelot vide de sens!

Après avoir peiné à trouver un taxi (et un chauffeur qui comprenait où on voulait aller), le retour s’est fait en séchant dans le train. Ouf! On a eu bien peur d’être malade après cette journée à patauger dans la flotte froide. L’avantage de savoir que le bateau restait à quai le soir: aucune panique lorsque nous avons constaté que tous les trains vers Haïfa avaient au moins 20 minutes de retard à Tel-Aviv… on est donc rentrés bien fatigués, mais bien contents de notre expérience complète et non-aseptisée par les excursions organisées.

Le lendemain matin, comme on savait qu’on avait que l’avant-midi pour explorer Haïfa, on a essayé d’être stratégique en planifiant nos déplacements. Du port, vers la Place de Paris, station inférieure du funiculaire Carmelit, puis ascension, marche vers les Jardins Baha’i et enfin, tournée vers la télécabine pulsée, puis retour vers le bateau. À part si j’avais utilisé ma montre, impossible de savoir la distance parcourue: nos évaluations par Google Maps nous faisaient marcher par des passages inexistants et il ignorait la passerelle piétonne à coté de notre bateau!

On a donc suivi notre plan. Le funiculaire Carmelit est vraiment comme celui de Tignes! Arrivés au sommet, c’est le déluge, et des forts vents. On attend que ça se calme puis on poursuit notre marche, en suivant notre trajectoire planifiée. Il n’y a presque personne dehors! On a croisé quelques passagers du même bateau que nous, les quelques braves qui ont osé comme nous sortir pour voir la ville. Après avoir admiré les Jardins Baha’i vus d’en haut (fermés, pour cause de pluie: les marches en marbre seraient trop glissantes!), on reprend vers l’autre colline, celle qui accueille la télécabine pulsée. Le soleil sort! C’est la fin de la pluie. Il faut chaud, humide, enfin, on sort de notre « cycle gris »! La vue d’Haïfa, où qu’on soit, est très belle. La ville est jolie et la végétation très méditerranéenne nous rappelle où on est, malgré tous ces alphabets « étranges » à nos yeux. Impossible d’emprunter la télécabine pulsée: fermée pour cause de vent! On s’en doutait un peu, on avait donc planifié notre retour par les rues descendantes en plan B.

La fin de la journée, sur le bateau, est moins « reposante »: après avoir quitté le port vers 15h00, le capitaine a mis les gaz à fond pour qu’on se dépêche de traverser la tempête. Vents de 90km/h, vagues de 20 pieds, ça brasse! J’ai du « plaisir » tant qu’il fait jour, mais une fois la nuit tombée, j’ai beau chercher un endroit calme, centré, là où le bateau bouge le moins… pas moyen. Gravol, et hop, dodo: tant pis pour le souper! Christophe, lui, pas du tout incommodé, se retrouve même à souper avec le capitaine dans le Windjammer!