Akelia est rarement distraite, c’est un fait. Ceux qui me connaissent peuvent en témoigner, _habituellement_, j’écoute très attentivement ce qu’on me raconte (sauf en classe), je n’oublie à peu près aucun anniversaire, je pense toujours à toutes mes choses quand je voyage, je prévois même pour les autres parfois. Qui plus est, je ne suis peut-être pas la plus ordonnée, mais je retrouve toujours tout, après de plus ou moins longues recherches, selon la taille/importance/date de dernière utilisation de la chose que je cherche. (J’allais faire une blague foireuse à propos de ma libido, mais je vais faire comme d’hab, m’abstenir.)(Hum.)
Donc, vous voyez où je veux en venir: il m’arrive parfois d’avoir le cerveau ailleurs, et de faire certaines petites choses par automatisme, voire même réflexe. Par exemple, quand je me sers un verre de jus, mon pied gauche est déjà en train de refermer la porte du frigo derrière la bouteille que je viens de ranger, tandis que je bois ma première gorgée. Pied gauche qui referme porte de frigo = automatisme. C’est la même chose pour le verrouillage de ma portière de voiture: dès que j’ouvre la porte, ma main gauche effleure le bouton qui verrouille, et hop, je referme la porte, et j’ai pas besoin de vérifier si c’est verrouillé, je le _sais_, puisque ma main gauche l’a fait par automatisme. (Et non, je n’ai pas une voiture assez récente pour avoir le verrouillage centralisé électrique des portières, gna, gna, gna.)
Bref, un beau jour de cet hiver –laissez-moi me souvenir, c’était probablement le 15 février, je venais de passer une nuit blanche à pondre un TP pour mon cours de journalisme, TP qui m’a valu un 17/20–, je disais donc, un beau jour de cet hiver, il tombait de la neige collante, épaisse, et pas quelques flocons par-ci, par-là, non-non-non.
De la grosse neige, du genre qui réduit la moyenne de vitesse de moitié sur la route, qui fait perdre le contrôle en tournant un coin de rue, et qui s’accumule sous/devant/derrière/sur/autour des essuie-glace. Je venais de faire un petit passage éclair par mon appart pour prendre une douche (j’avais passé la nuit à travailler, je vous le rappelle), et je retournais à l’Université, mon TP fraîchement imprimé dans mon sac.
Je déblaie ma voiture (déjà c’était du sport, j’avais à peine terminé la 2ème moitié du pare-brise que la première moitié était à refaire), je monte dedans, et je pars. Je tourne un premier coin de rue, puis rendue au deuxième, j’utilise mes essuie-glace, qui se retrouvent un peu coincés au beau milieu de mon pare-brise, à cause de l’accumulation de neige collante. Aucun mouvement possible, je dois donc sortir de la voiture et ôter la neige moi-même.
Je me gare sur le côté de la rue, je mets le frein à main, j’ouvre la portière, je sors, je contourne la voiture, j’enlève la neige, et je reviens à ma porte… qui ne s’ouvre pas. Même après tambourinage et tentative d’arrachage de poignée tout de suite contrecarrée par cerveau intelligent qui dit “nan, pas casser poignée, sera utile plus tard”, que nenni, cette fioutue porte refuse de s’ouvrir, Sésame.
Ô rage, ô désespoir, ô serrure ennemie.
Il est 7h25, je dois être à l’Université pour 8h30 (début de mon cours), j’ai 15 km à parcourir dans le trafic ralenti par la neige glissante, ma voiture tourne, mon téléphone est _dans_ mon sac qui est _dans_ ma voiture, tout comme mes clés, qui sont au contact, puisque la voiture tourne. Restons calme. Zen, Akelia, zen.
Eclair de génie: “des fois que” j’aurais pas laissé la portière droite déverrouillée, par hasard ?! Mais oui, bien sûr, je ne me sers à peu près jamais de cette porte à moins de la présence d’un passager, il est évident que celle-ci sera ouverte LE matin qui suit la nuit que j’ai passée à travailler seule ! Porte fermée à clé, bien évidemment…
Solution de dépit: retourner à l’appart (je suis à deux coins de rue de toute façon), sonner pour réveiller coloc qui pionce encore tranquillement, emprunter téléphone. Après avoir essuyé le regard mi-furieux et mi-amusé du mec en caleçons que je viens de tirer de ses draps en martelant la sonnette qui se fout de ma gueule parce que j’ai oublié mes clés (coloc qui se fout de ma gueule, pas la sonnette), j’appelle le CAA, organisme qui offre certains services de dépannage aux automobilistes qui sont membres. Joie et bonheur, je suis membre, et le service de “dépannage pour idiote qui a oublié ses clés dans le contact et qui s’est enfermée hors de sa voiture” est gratuit. Je vous retranscris le dialogue, ça valait son pesant de cacahuètes…
– CAA Québec, Madame TrucChose à l’appareil, comment puis-je vous aider ?
– Oui, euh, bonjour, vous pouvez m’aider, certainement… euh… (ouais, aidez-moi, vous des dons de télékinésie ?? ça m’arrangerait !)
– … oui ?
– Euh, je me suis enfermée en dehors de ma voiture… (genre “je suis blonde ce matin”…)
– D’accord, et les clés sont dans le contact ?
– Ben, oui, sinon je ne serais pas enfermée… (ha, c’est ptêt pas moi la plus blonde, tiens…)
– Bon, et la voiture est en marche ?
– Oui.
– D’accord, et vous êtes où ?
– Chez moi.
– Euh… et la voiture, elle ?
– … dans la rue ? (tilt) sur le côté de la rue, elle ne bloque pas le trafic.
– D’accord, avez-vous l’adresse exacte ?
– Oui, au coin de la rue des Goélands et de l’Estuaire…
– Pas de numéro civique ?
– (ouais, si vous voulez, j’appelle la ville pour avoir le numéro de la bouche d’égoût qui est à ce coin de rue, peut-être ??) Ben, non, je suis au coin de la rue…
– D’accord. Et il y a un enfant à bord ?
– Pardon ?!
– Est-ce qu’il y a un enfant à bord ?
– … (attendez que je me souvienne… non, je n’ai pas été enceinte dernièrement, je n’ai pas adopté non plus, alors non, y’a des chances que la voiture soit vide de passagers… d’ailleurs, s’il y avait eu, je leur aurais demandé de m’ouvrir la porte s’ils en avaient été capables !) Ah ! Non, pas d’enfants à bord… (vous croyez pas que j’aurais été un brin plus paniquée s’il y avait eu un enfant dans la voiture ?!)
– D’accord, et il y a un numéro où on peut vous rejoindre ?
– … ben vous pouvez toujours prendre le numéro de mon téléphone portable, mais… il est dans la voiture…
– D’accord, on vous envoie quelqu’un, ça ne devrait pas prendre plus de 40 minutes, c’est notre règle de service.
– (40 MINUTES ?! Punaise mais moi je vais arriver à 9h00 à l’Université !!) *gloups* Okay, j’attendrai près de la voiture…
Finalement, le mec du CAA est arrivé 15 minutes après, mort de rire de voir une fille détrempée sous la neige fondante, la tête baissée sous son capuchon, les mains dans les poches, il a déverrouillé ma portière en 48 secondes top chrono, et il est reparti tout aussi hilare quand il a entendu ce qui jouait dans la voiture au moment où il a ouvert la porte: Pérusse – Le gars qui magasine – le sketch où il appelle au remorquage parce que sa voiture ne démarre pas.
Je suis arrivée à l’heure à mon cours, et depuis, je surveille ma main gauche pour éviter qu’elle ne me verrouille trop vite ma portière quand je sors de ma voiture.
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