… que je suis rentrée bourrée chez moi. (J’avais dit que je le raconterais, hé ben voilà. Préparez-vous à un grand moment de solitude, Pure Akelian Stuff.)
Donc, la première fois que je suis rentrée chez moi avec plus d’alcool que de sang dans les veines.
J’avais 17 ans et demi, soit 6 mois de pas assez pour atteindre l’âge légal pour consommer quelque chose d’acoolisé au Québec.
(Punaise je fais le calcul, ça ne me rajeunit pas :/)
Une petite précision s’impose: là où j’habitais, c’était en campagne, avec 2,5 km de chemin de terre à parcourir avant d’arriver, aucun éclairage le soir.
J’avais passé la soirée chez des potes, au centre-ville (enfin, si on peut appeler ça un centre-ville)(ceux qui connaissent la réputation de La Tuque vont comprendre), j’étais allée en voiture.
La soirée avance, on avait prévu de se regarder un film, tout tranquillos.
K7 dans le magnétoscope, le générique commence.
– T’as quelque chose à boire ?
– Y’a du Coke dans le frigo.
– Aaaaah t’as pas du Pepsi ? (rivalité, quand tu nous tiens)
– Nan.
– Bon… (en se levant) quelqu’un veut quelque chose ?
– *murmures qui ne disent rien de plus que “ptet, chaipa”*.
– Okay j’ai compris, je fais le listing de ce qu’il y a à boire: *inspiration* Coke, 7-up, jus d’orange, lait, jus de raisins, rhum, vodka, Gatorade aux cerises, tequila–
– Vodka-jus d’orange pour moi steup’
– Et pour moi rhum & Coke
– Nan mais vous êtes fous ?? si mes parents s’en rendent compte ils vont me tuer !!
– … on en prendra pas beaucoup…
(c’est ça, ouais…)
Donc finalement on a regardé le film laissé la K7 se lire dans le magnétoscope en remplissant verre sur verre.
Un flash:
– Je rentre comment, moi ???? (j’étais en voiture, ne l’oubliez pas…)
– Tu rentres pas… HAHAHHAHAHA *rires de tout le monde*
– heu ouais mais nan, faut que je rentre, ma mère sera pas trop contente… (précision: mes potes connaissent tous ma mère parce qu’elle est ma mère, mais aussi parce qu’elle leur a tous enseigné une matière scolaire quelconque au moins un an)
– Heuu… *creusage intensif du peu de neurones qu’il nous reste*
– J’te prête mon vélo ?
– Ça roule–
– Super, j’prendrais un autre verre de jus d’orange steup’ !
– Nan, t’as pas compris, jveux dire, ça roule encore, ce truc avec deux roues et un guidon ?
– … Ouais, ouais, t’inquiètes…
– *pas rassurée mais bon, c’est pas comme si j’avais le choix*
Donc, la beuverie impromptue se poursuit, jusqu’à 01:00: là, j’ai la tête qui tourne grave, et le plancher du salon m’a sauté au visage plusieurs fois.
– Bon moi je rentre les mecs…
– Tu veux une escorte ? hahahahaha
– Merci ça ira *hips*, rentrez bien vous aussi… (ils ont du bol eux, ils habitent tous en ville)
J’ai fini par réussir à enfourcher ce satané vélo. Entre le moment où j’ai dit aurevoir et celui où je suis vraiment partie, il a du se passer au moins 30 minutes.
Enfourcher le vélo, c’est pas tout, fallait garder l’équilibre, sur ce putain de machin.
Blessée dans mon orgeuil profond j’étais, car de dévaler des pentes de montagne à fond la caisse l’habitude j’avais.
J’ai fini par réussir à partir, avec mon sac à dos, une grosse bouteille d’eau, mes neurones à plat, et le vélo qui n’était pas dans un meilleur état que mon cerveau.
Normalement (je dis bien normalement), j’avais 4km à parcourir avant d’arriver chez moi, 5 à tout casser.
J’ai du en faire au moins le double, ne serait-ce que parce que mon sens de gravité et d’équilibre avait totalement oublié ce que c’était une ligne droite.
Je vous épargne les détails style “pété la gueule par terre à cause d’un caillou qui avait *échappé* à mon *attention* dans le chemin de terre pas éclairé”.
En plus je devais rouler à 2 à l’heure et j’avais l’impression que ça allait trop vite…
Finalement arrivée à la maison, tout est éteint. Humpf. En plus, pas de Lune pour m’éclairer.
Qu’à cela ne tienne, c’est mon terrain, ma maison, je la connais, et je sais qu’il y a pile 19 marches à monter avant d’arriver à la porte. J’ai largué le vélo au pied de l’escalier, j’allais pas me farcir la montée avec ce machin encombrant qui risquait de m’entraîner dans une dégringolade plus qu’assurée.
En plus, ça aurait fait tout plein de bruit.
L’ascension commence.
J’ai du me péter les genoux au moins 5 fois, le tout en essayant de compter les marches:
1, 2, 3, 4, 5, 6, *bing**ouch*, 6, 7, 8, … ce qui fait que quand je suis arrivée en haut de l’escalier (enfin, je croyais être arrivée), j’ai raté une marche invisible, la dernière.
J’avais du compter une marche 2 fois, ou m’enfin…
Donc, je rate une marche invisible: *SCHBLAM* je m’étale de tout mon long et de tout mon côté sur la petite galerie devant la porte.
Je ne sais pas du tout combien de temps j’ai pu rester comme ça, mais en tout cas, j’ai pris mon temps, j’étais pas pressée de me relever.
Pendant que j’étais couchée, j’écoutais *attentivement*: aucun bruit dans la maison, pas de chat, pas de chien… Super, ils dorment tous.
J’ai fini par me relever, en m’agrippant à la balustrade.
Prochaine étape (après “arriver à tenir debout”): trouver mes clés.
Farfouillage dans le sac, trouve le trousseau de clés au son, schling schling, non ça c’est de la monnaie, re-schling re-schling c’est bon, j’ai les clés.
Etape “ouverture de porte” enclanchée: “gngnngng. Oùkélé la poignée ? Ha merde elle est pas à gauche… bon si elle est pas à gauche, elle est à droite. Ah je l’ai.”
Je ne lâche pas la poignée, et je cherche LA bonne clé dans mon trousseau (qui en comptait au moins 5 ou 6, bref, trop pour mon cerveau affaibli).
J’ai fini par toutes les essayer une par une, toujours à l’envers puis à l’endroit, pour qu’enfin ce soit la dernière (évidemment, j’aurais du y penser) qui se glissait dans la serrure.
Je tourne la poignée: porte même pas fermée à clé. Merde, j’ai perdu tout ce temps pour rien.
M’enfin, un éclair de génie traverse furtivement mon cerveau: “si tu enlevais tes chaussures, tu ferais pas de bruit en marchant”.
Ha oué trop bon comme idée. J’enlève mes chaussures. Puis je pousse la porte. Gngngnng. Qui bloque après s’être ouverte de 30 cm. Je ne me glisse PAS dans 30 cm, encore moins parce qu’il y a une petite table à droite de la porte.
Je peste: “qui c’est le connard qui a encore laissé ses chaussures derrière la porte et que ça bloque la porte gngngngn grmblmlmlml”, tout en poussant *vigoureusement* sur la porte, qui a fini par céder (étrangement, plus rien n’offrait de résistance) et BAM, la porte est allée percuter la première marche de l’escalier qui mène à l’étage.
Merde. Avec ça, si j’ai pas réveillé toute la maisonnée PLUS les voisins, y’a un dieu qui veille sur les ivrognes, et il s’occupe de moi ce soir.
J’entre dans la maison (toujours plongée dans l’obscurité), je dépose mes chaussures, je referme la porte, le tout avec une lenteur (pas calculée du tout) escargotesque.
Je monte à ma chambre (pas de pépins dans l’escalier cette fois), j’ouvre ma porte, je dépose mon sac, et tout juste au moment où j’allais fermer la porte de ma chambre en poussant un soupir de soulagement, *CLIC* la lumière de l’escalier s’allume, et je vois ma mère, en robe de chambre, la main sur l’interrupteur, avec un oeil endormi, l’autre aussi narquois que son sourire: “alors, c’était bien, ce film ?”
…
Merci maman.
Merci d’avoir bloqué la porte pendant que j’essayais de l’ouvrir. (Elle s’est payé ma tête pendant 2 semaines.)
Merci d’avoir ôté toute ombre d’espoir quant à ma discrétion quand je suis bourrée.
Merci d’avoir gentiment évité le sujet jusqu’au lendemain matin.
Parce que j’ai été incapable d’articuler le titre du film, je voyais déjà mon lit qui me faisait de l’oeil.
Le lendemain, je suis descendue avec un mal de cheveux pas possible (tout en feignant le contraire, évidemment)(orgeuil, toujours orgeuil)(genre “ouais ma première cuite moi même pas mal pffff”), et en me servant un verre de jus d’orange, la nausée m’a pris, subitement.
Ma mère, délicate, compréhensive: “ALORS, COMMENT CA VA C’MATIN ??”
*Gngngnngngnpasparlerfortmatêeeeeeeeteuuuuh*
“Ouais, ouais, ça va…”
[insérez ici discussion style “t’as vu l’heure blablabla” mais sur le mode “je te gronde pas du tout, je me fous de ta gueule, ça a encore plus d’effet”]
Interlude: le téléphone sonne.
Un pote qui appelle pour savoir si j’étais bien rentrée, avec tous mes morceaux, etc etc etc… Ma mère en a profité pour lui demander ce qu’on avait regardé comme film parce que j’avais toujours pas répondu, et elle a aussi demandé ce qu’on avait picolé.
…
Merci, les mecs.
La délation, ça se paie !!!
(Pour les 4 qui suivent encore, on a fait un échange vélo-bagnole dans l’après-midi, et j’ai toujours pas retrouvé le titre de ce putain de film.)
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